Quand on est compétiteur jusqu’au bout des ongles, difficile de vivre une course à l’arrière du peloton, loin de la bataille en tête de course. Yoann Richomme et Corentin Horeau connaissent trop la course au large pour savoir qu’il faut s’adapter à tout, même à revoir ses plans à 180° à cause d’une collision avec une bouée après le départ d’une transatlantique prestigieuse. Mais après un incroyable travail de l’équipe technique, ils ont repris leur route et entamé une autre course jusqu’en Martinique.
Après la dépression, le début d’une remontée
Les deux hommes n’ont pas vraiment été gâtés par la météo qui s’est avérée particulièrement éprouvante, notamment en milieu de semaine dernière. Yoann et Corentin ont fait partie des rares marins de la course à se confronter aux conditions les plus rudes d’une dépression qui a poussé les organisateurs à rapatrier l’ensemble des Class40 à La Corogne. « Il y a eu 35 nœuds de vent moyen, des claques à 48 nœuds, on s’était surtout bien préparés pour tenir le coup et être sur le qui-vive », expliquait alors Corentin Horeau.
Après avoir résisté à cette dépression, ils ont continué à progresser vers le sud en commençant leur longue remontée. 18e jeudi dernier, 15e samedi et 13e dimanche : Paprec Arkéa est revenu sur les retardataires. Malgré leur abnégation, le scénario météo ne joue pas en leur faveur et la tête de course s’est depuis longtemps échappée, profitant de conditions particulièrement propices à la vitesse depuis leur sortie des Canaries.
Le « top 10 » dans le viseur
En parallèle, Paprec Arkéa a plongé vers les côtes marocaines avant d’empanner vers la Martinique lundi soir. « On a attendu le retour de l’alizé et ses 15 à 20 nœuds de vent moyen pour glisser tranquillement jusqu’aux Antilles », sourit Corentin Horeau. « On a six jours assez tranquilles avec le vent qui va se renforcer à partir de ce soir ou demain », précise Yoann Richomme. Les petits objectifs du moment sont simples : « remonter quelques bateaux » dixit Yoann, « rattraper les bateaux à dérives » ajoute Corentin. Fives Group – Lantana Environnement (Louis Duc et Masa Suzuki, 12e) et Café Joyeux (Nico d’Estais et Simon Koster, 11e), les deux derniers bateaux à dérive devant eux, pointent en effet à moins de 120 milles. « On va essayer aussi de revenir sur Romain Attanasio et Maxime Sorel (Fortinet – Best Western). Ils sont un peu plus loin mais c’est jouable ». Romain et Maxime pointent à près de 340 milles ; les dépasser permettrait à Paprec Arkéa de se hisser à la 10e place.
Pour les deux hommes, l’essentiel est ailleurs. Les jours qui passent permettent progressivement d’oublier la déception sportive. Corentin, qui reprendra l’IMOCA à l’issue de la course, continue d’apprendre au côté de Yoann. « Je lui pose toujours des questions et je continue à prendre des notes ». Surtout, l’ambiance est détendue à bord. Les deux skippers ont tiré profit des conditions clémentes pour prendre une douche sur le pont du bateau ce lundi. Ils ont immortalisé un arc-en-ciel, filmé un impressionnant banc d’une vingtaine de dauphins ou encore profité d'un incroyable lever de soleil. C’était le cas ce mardi matin sur une mer plate comme l’a montré Yoann dans une vidéo : « c’est agréable, ça glisse tout seul, sans effort ». Le skipper est ému et rappelle qu’il s’agit de sa « dernière traversée avec ce bateau ». « C’est vraiment très cool », ajoute-t-il en filmant le soleil qui monte au-dessus de l’horizon.
Et puis il y a ces échanges, ces souvenirs et ces anecdotes qui mettent le sourire. « Lors d’une de nos premières transatlantiques en Figaro, on était aussi passés près des côtes africaines », se souvient Corentin. Ce décalage vers l’Afrique permet surtout aux deux hommes de « ressortir avec un bon angle » pour filer dans l’alizé. Leur aventure se poursuivra donc tout au long de la semaine jusqu’à Fort-de-France. « Il nous reste sept jours de mer, assure Corentin. Je pense qu’on arrivera entre lundi et mardi matin ! »